avec chacun d’entre eux ou recevra-t-il un soutien égal de leur part? Des
études montrent que les enfants issus d’une première union ont tendance
à perdre contact avec le parent et sont moins susceptibles de le soutenir
lorsque celui-ci a des enfants d’une seconde union. »
Ces questions sont également d’intérêt pour Mme Harder, de l’Université
de l’Alberta. « Auparavant, les pensions gouvernementales n’existaient
pas, et les enfants devaient assurer la sécurité financière de leurs parents
âgés. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, mais j’ai l’impression que cette
situation pourrait revenir, croit Mme Harder. Vu la présence d’un gouverne-
ment conservateur à Ottawa, je me demande si l’accent ne sera pas mis peu
à peu sur la responsabilité des enfants envers leurs aînés. »
Dans les faits, cela se produit déjà, et beaucoup de familles auraient be-
soin d’une aide gouvernementale accrue, explique Nora Spinks, directrice
générale de l’Institut Vanier de la famille. Les administrations municipales,
par exemple, mettent du temps à revoir les règlements d’habitation pour
mieux tenir compte de la réalité des familles multigénérationnelles qui
vivent sous un même toit, les jeunes au chômage ou sous-employés reve-
nant chez leurs parents pour des raisons financières, faisant ainsi concur-
rence aux grands-parents à la charge de leurs parents.
« Les enfants vivent au sous-sol, ou la grand-mère habite un logement
indépendant à l’intérieur de la propriété, mais dans beaucoup de villes,
cette situation est encore illégale, explique Mme Spinks. Les maisons multi-
générationnelles feront leur apparition sur le marché d’ici quelques
années. Des familles auront pourtant vécu en mode multigénérationnel
pendant plus d’une décennie avant que l’architecture rattrape le retard. »
Selon Roderic Beaujot, professeur émérite au département de sociolo-
gie de l’Université Western, les changements qui s’opèrent dans la structure
familiale sont généralement perçus de façon positive par la société. « Les
choix familiaux se multiplient, l’égalité entre les hommes et les femmes
est plus présente, et les couples ont moins d’enfants, ce qui leur permet
d’investir davantage dans chaque enfant. »
« Parallèlement, ces changements entraînent d’autres formes d’inégalité,
et les politiques doivent être modifiées en conséquence. Dans le cas des
Le mariage gai – pas de quoi
en faire un plat
Les familles canadiennes sont
beaucoup plus diversifiées qu’au-
paravant, et les Canadiens sont
beaucoup plus enclins à accepter
cette diversité, constate Roderic
Beaujot, professeur émérite de
sociologie à l’Université Western.
« C’est particulièrement évident en
ce qui a trait au mariage entre
conjoints de même sexe. » Selon
des sondages récents, plus de
enfants, il y a un manque d’équité associé aux familles monoparentales et
recomposées. Dans le cas des jeunes adultes, des différences sont obser-
vables chez ceux qui ont bénéficié d’investissements parentaux et sociaux
moins importants. »
Dans un discours prononcé l’an dernier à l’Université Lakehead,
M. Beaujot expliquait que les couples qui se marient et ont des enfants
jeunes sont plus susceptibles de se séparer – tout comme les couples en
union libre – que ceux qui terminent d’abord leurs études et qui pensent
ensuite à se marier et à avoir des enfants. Les enfants issus de ces ménages
stables et généralement bi-actifs disposent d’un avantage économique
indiscutable et, souvent, d’un avantage social comparativement à ceux de
familles monoparentales et recomposées.
Ces inégalités sont exacerbées par ce que M. Beaujot appelle la tendance
à l’homogamie, un principe selon lequel les personnes très scolarisées et
privilégiées qui présentent un potentiel de revenu élevé se marient entre
elles, et transmettent de ce fait leurs avantages à leurs enfants. (Bien entendu,
« impossible d’empêcher des parents compétents d’offrir une longueur
d’avance à leurs propres enfants », fait-il remarquer avec une pointe d’ironie.)
« Nous devons donc travailler encore plus fort pour surmonter
les inégalités. Si un de nos objectifs, en tant que société, est d’offrir aux
personnes désavantagées la chance d’améliorer leur sort, nous devons
redoubler d’efforts. »
M. Beaujot explique que les différents niveaux de gouvernement au
Canada ont permis aux parents seuls, en particulier les mères, d’améliorer
leur statut socioéconomique en mettant sur pied des programmes de subvention des services de garde et d’aide au retour sur le marché du travail ou
aux études. Malgré cela, l’écart qui se creuse entre les familles monoparentales et les familles comptant deux parents « pose de graves problèmes ».
Il faut aussi tenir compte des nouvelles frontières tracées par les techniques de reproduction, et des droits des enfants nés des suites d’une entente
avec une mère porteuse ou d’un don de sperme ou d’ovules. « L’affaire des
donneurs de sperme non anonymes en Colombie-Britannique va faire
beaucoup de bruit », prévoit Mme Harder, faisant référence à un recours
collectif entamé par des enfants de donneurs de sperme et qui est actuellement entre les mains de la justice.
Selon la poursuite, la législation actuelle est discriminatoire envers
les personnes nées d’un don de gamètes, contrairement aux enfants adop-tés qui jouissent de certains droits et ont la possibilité de connaître leurs
parents biologiques. « Les fermiers gardent des registres plus complets de
l’insémination artificielle de leurs bovins que ne le font les médecins
de la Colombie-Britannique pour des personnes comme moi », a déclaré
Olivia Pratten, représentante des plaignants, lorsque la poursuite a été
entamée en 2008.
aiment l’idée que ceux qui le
souhaitent soient libres de le faire »,
explique M. Beaujot. Cependant,
dans la plupart des provinces, le
« co-parent » non biologique d’un
enfant doit encore se tourner vers
les tribunaux pour l’adopter
officiellement ou obtenir une
déclaration de parenté.